Enseignement supérieur : des étudiants sont formés par des experts
Près de 140 experts de l’Institut interviennent chaque année dans des universités et écoles d’ingénieurs en France. Ils contribuent également à des formations continues à destination de professionnels concernés par la maîtrise des risques. Comment se déroulent ces enseignements ? Quelles thématiques sont abordées ? Pour quels bénéfices ? Cinq structures témoignent.
1. Pourquoi l’enseignement supérieur fait-il appel à l’Institut ?
Au cours des trois dernières années, près de 50 établissements sollicitent les experts de l’Institut pour intervenir dans des cours, soit un volume total annuel de 1 000 heures. Une tendance qui se développe avec l’actuelle relance de la filière nucléaire, comme en témoigne Jean-François Hochepied, responsable du parcours nucléaire au sein de l’Ensta1 Paris : « Notre précédente formation sur le sujet est tombée en désuétude à la suite de l’accident de Fukushima. Nous en relançons une nouvelle pour la rentrée 2024 au vu du regain d’intérêt de ce secteur. » Pour d’autres structures comme l’université Paris-Saclay en Île-de-France, le partenariat est bien plus ancien. « Peu d’entités sont capables d’enseigner au niveau de spécialisation qu’exige notre master Nuclear Energy et sur des thématiques de niche comme la sûreté nucléaire et la radioprotection », explique Élisabeth Dufour-Gergam, chargée de formations transverses. Un constat partagé par Maxime Wlodarczak, responsable des enseignements nucléaires à l’Insa2 Hauts-de-France et l’IMT3 Nord Europe : « Leurs experts sont capables de parler de sujets hautement techniques sans tomber dans la bibliographie. Ils vivent au quotidien ce dont ils parlent aux étudiants. »
2. Dans quelles formations les experts interviennent-ils ?
Il s’agit de formations académiques et continues. C’est le cas par exemple du diplôme d’université Radioprotection appliquée à la médecine du travail (Duramt). « Pour cet enseignement qui s’adresse à des professionnels de santé, notamment à des médecins du travail intervenant dans des installations nucléaires, l’IRSN contribue au tiers des 35 heures de cours pratiques avec, par exemple, la visite de ses laboratoires au Vésinet et des exercices de mesures radiologiques », explique le professeur Jean-Christophe Amabile, responsable pédagogique de ce diplôme à l’université Paris-Cité.
Quant aux cursus académiques, il s’agit de diplômes spécialisés dans le nucléaire et de parcours d’ingénieurs généralistes dans lesquels une « coloration nucléaire » est apportée. « De nombreux ingénieurs généralistes n’abordent pas du tout la question nucléaire lors de leurs études. En travaillant avec l’IRSN sur un volume oscillant entre 30 et 100 heures, nos ingénieurs ont désormais des clés pour mieux comprendre les enjeux de la sûreté de la filière », insiste Maxime Wlodarczak.
3. Quelles sont les thématiques abordées ?
L’Institut intervient sur l’ensemble des thématiques pour lesquelles il est compétent : sûreté nucléaire, radioprotection et surveillance de l’environnement. À l’université de Nîmes (Gard), dans le cadre du master Risques environnementaux et sûreté nucléaire (Resnuc), les thématiques traitées sont : la sûreté, la surveillance radiologique du territoire, le comportement des radionucléides et leur transfert dans l’environnement. À l’Insa Hauts-de-France et l’IMT Nord Europe, l’accent est mis sur les retours d’expérience des accidents par des études de cas et sur les principes et fondamentaux de sûreté. Tandis que le Duramt, à destination des médecins du travail, aborde davantage des notions d’épidémiologie des rayonnements ionisants ou des calculs de doses engagées après une contamination interne.
4. Sous quelles formes se déroulent ces interventions ?
Les cours théoriques sont surtout constitués de séminaires d’une demi-journée sur des questions pointues comme la conformité des installations, les démarches de sûreté… Mais l’enseignement pratique occupe une place prépondérante dans de nombreux cursus. Au sein du master Resnuc par exemple « les étudiants effectuent des visites du laboratoire souterrain d’expérimentation à Tournemire, dans l’Aveyron, ou du centre technique de crise dans les Hauts-de-Seine », souligne Loïc Ducros, maître de conférences. « C’est une formidable occasion pour eux d’effectuer des travaux pratiques autour de la radioprotection avec différents ateliers de mesure de sources radioactives ou de découvrir notamment des robots téléopérés qui mesurent la radioactivité du sol en cas de crise. »
5. Quels bénéfices en retirent les étudiants et les professionnels ?
« Nos étudiants ont accès à des scientifiques qui ont une expertise pointue en radioprotection et en sûreté », indique Élisabeth Dufour-Gergam. « Leur expérience pratique, et pas seulement théorique, est précieuse pour les professionnels suivant le Duramt, car l’IRSN maîtrise réellement tous les aspects pratiques de la radioprotection », renchérit Jean-Christophe Amabile. Autre bénéfice de ces formations : elles suscitent des vocations. C’est une fierté pour ces acteurs de l’enseignement supérieur de partager leurs savoirs et leurs expériences. Après les cours théoriques et les visites de sites, nombre d’étudiants ingénieurs qui n’étaient pas sensibilisés au nucléaire choisissent de se tourner vers ce secteur.
1. École nationale supérieure de techniques avancées
2. Institut national des sciences appliquées, à Valenciennes
3. Institut Mines Télécom Nord Europe, dans les Hauts de France
Article publié en octobre 2024