Centrales nucléaires : les contrôles des exploitants sont suivis par des acteurs publics

Les exploitants des centrales nucléaires respectent-ils les dispositions réglementaires pour les prélèvements d’eau, les rejets d’effluents, la surveillance de l’environnement ? Pour s’en assurer, l’Autorité de sûreté nucléaire réalise des inspections inopinées. L’IRSN l’accompagne. 

Près de la centrale du Tricastin (Drôme et Vaucluse), certains échantillons pour la surveillance de l’environnement sont prélevés dans la Gafflière, en aval du site. - © Noak/Le bar Floréal/Médiathèque IRSN

TEMOIGNAGE – Loïc Fouchet : “Les inspections confortent la qualité de nos contrôles”

Loïc Fouchet Ingénieur environnement de la centrale nucléaire de Paluel (Seine-Maritime). - © Olivré Didier/EDF

“Depuis les premières visites techniques de l’IRSN en 2004, nous travaillons ensemble à une amélioration continue de nos techniques de contrôles et d’analyses. Auparavant, il était parfois difficile de comparer nos résultats, car nos méthodes d’analyses étaient différentes : temps de comptage, volumes analysés, etc. Depuis plusieurs années, nous nous attachons à employer des techniques similaires, afin de comparer objectivement nos résultats. Nous avons amélioré nos méthodes, bénéficiant des dernières technologies et évolutions normatives. Des réunions de retour d’expérience sont organisées entre chaque inspection pour une analyse approfondie des résultats. Nous nous coordonnons avec l’Institut avec un objectif commun : avoir les analyses les plus fines possibles et réaliser des échantillonnages pertinents et comparables. Il s’agit de donner à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) une vision représentative et consolidée de la qualité des analyses et des résultats produits par le site de Paluel.

Mieux analyser l’eau de mer 
À la suite des inspections menées entre 2005 et 2010, l’IRSN et EDF ont harmonisé leurs procédures de détermination des incertitudes de mesure, notamment pour l’analyse des échantillons en matrice eau de mer. Nous avons affiné les temps de purge, en fonction des matériels utilisés pour l’échantillonnage des eaux souterraines. Le but est d’obtenir des échantillons plus représentatifs. Les inspections inopinées apportent un regard extérieur qui conforte la légitimité de l’exploitant.

 

L’eau prélevée aux abords de la centrale est filtrée par un filtre à 0,22 microns pour enlever les matières en suspension - © Célia Goumard/Médiathèque IRSN

INFOGRAPHIE – Rejets liquides d’une centrale nucléaire : quels contrôles ?

Les rejets liquides de ces centrales sont réglementés. L'exploitant les contrôle. L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) auxquelles participent les spécialistes de l'IRSN, des prélèvements sont effectués à l'intérieur et autour du site. Ils sont analysés par l'exploitant et l'Institut, ce qui contribue à la radioprotection.


AVIS D’EXPERT – Chloé Laconici : “Les divergences sont rares”

Chloé Laconici - Technicienne de prélèvement

Lors des inspections, les résultats de notre laboratoire et ceux d’EDF montrent très peu de différences. C’est vrai pour des échantillons provenant de la centrale, comme pour ceux de son environnement. La plus récente divergence date de 2016-2017. Elle a concerné une analyse de l’indice du rayonnement bêta. Une discussion entre nos équipes et celles de l’exploitant a permis de l’expliquer. Les tests n’avaient pas été menées le même jour.
Sachant que la radioactivité des échantillons décroît avec le temps, cela a faussé la comparaison. La méthodologie de cette analyse des échantillons est depuis renforcée. Au moment du prélèvement, nous indiquons une date d’examen à respecter. Nous prenons systématiquement un troisième échantillon. Il demeure scellé pour une analyse éventuelle par un laboratoire tiers. Il est utile en cas de litige inexplicable. Une telle situation ne s’est encore jamais présentée. Nous échangeons avec les équipes des industriels sur les meilleures pratiques. J’ai par exemple préconisé l’utilisation d’un contenant spécifique ou un nettoyage plus minutieux des outils de prélèvement.
La qualité de l’échantillonnage est capitale, elle conditionne celle de l’analyse.


INFORMATIONS PRATIQUES

Chiffres clés

À l’IRSN, neuf personnes sont impliquées sur cette thématique. Jusqu’à deux-cent-cinquante analyses sont effectuées chaque année à l’issue de huit à dix inspections. Depuis seize ans, l’Institut a participé à une cinquantaine d’inspections de ce type.

Réglementaire

Code de l’environnement – partie législative : textes issus de la loi 2006-686  du 13 juin 2006 relative à la transparence  et à la sécurité en matière nucléaire (dite « TSN ») codifiée. Loi 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques, dite « Lema », codifiée aux articles L. 210-1 et suivants, et R. 211-1 et suivants du Code  de l’environnement.
Liste de laboratoires agréés sur asn.fr dans l’onglet « L’ASN réglemente », puis « Mesures de la radioactivité dans l'environnement »

Dates clés 

1994 : entrée en vigueur de l’obligation d’autocontrôle des rejets par l’exploitant. 
2004 : premières inspections sur le thème prélèvements et mesures par l’ASN.
2011 : le protocole d’inspections sur le thème mesure est modifié : ajout des inspections inopinées


POUR EN SAVOIR PLUS

RNM : Réseau national de mesures de la radioactivité de l’environnement www.mesure-radioactivite.fr
Résultats des mesures réalisées hors site consultables sur le RNM


CONTACT

  • Azza HABIBI

    Laboratoire d’expertise, de radiochimie et de chimie analytique (LERCA), cheffe du laboratoire, 01.30.15.37.97, azza.habibi@irsn.fr


Article publié en janvier 2022